Quel est le point commun entre une querelle de couple pour savoir qui va payer l’addition, un casting de mode aussi cynique qu’hilarant, la vie hors-sol des milliardaires et un naufrage qui prend des airs de Koh-Lanta ?


Sans doute une critique du capitalisme et de la superficialité de notre monde occidental. Certes, mais pas seulement. Car il y a quelque chose du Parasite de Bong Joon Ho dans cette comédie caustique suédo-franco-germano-britannico-américaine. Une même ironie, une même outrance où tout le monde en prend pour son grade. En trois chapitres, Ruben Östlund règle leur compte aux professionnels de la fashion, aux influenceurs d’Instagram, au monde du travail, aux ultrariches comme au personnel de ménage. Et comme souvent, lorsqu’il s’agit d’outrance, de caricature, de trait forcé, la fiction est tout de même très proche de la réalité, puisque c’est avant tout d’une critique du pouvoir dont il s’agit, et à travers elle, d’une critique du genre humain. A noter une scène de tempête en mer magistralement vomito-scatologique dont la longueur n’a d’égal que la drôlerie.

Sans Filtre (Triangle Of Sadness), de Ruben Östlund, 2022

Une plongée au cœur de l’anti-Terrorisme pendant les cinq jours d’enquête qui ont suivi les attentats du 13 Novembre 2015.

Après son dernier film « Bac Nord », Cédric Jimenez signe un film d’intrigue, qui nous tient en haleine tout le long par cette traque et le jeu d’acteurs admirable. Jean Dujardin crève l’écran et procure de nombreuses émotions, à nous français et encore plus pour les Parisiens. Un pur chef-d’œuvre !

Novembre, de Jimenez Cédric, 2022

Il y a des westerns qui paraissent peu réalistes.


First Cow n’est pas de ceux-là. Ici ni fusillade spectaculaire, ni poursuite effrénée. Pour son septième long-métrage, la cinéaste américaine Kelly Reichardt nous montre le quotidien d’une poignée d’hommes (il y a très peu de femmes dans le film), établis au milieu d’une forêt de l’Oregon. Nous sommes au début du XIXe siècle et la vie est dure pour les pionniers. « Chasse, pêche et perdition. » On suit le parcours d’un homme, qui tentera de survivre en mettant à profit ce qu’il sait faire de mieux, la pâtisserie. La forêt luxuriante de l’Oregon est omniprésente, avec ses infinies nuances de verts. De nombreux feux de camps brûlent dans ces paysages sombres et boueux. Kelly Reichardt utilise des objectifs à très faible profondeur de champ pour isoler certains plans de l’image. Le bokeh provoqué accentue l’impression que l’on ressent de contempler des tableaux. First Cow est un western original, lent et sensible. Un film sur l’amitié de deux hommes, à la fois doux et sauvage

First Cow, de Kelly Reichardt, 2021

Japon années 1960.


 

Tandis que Tokyo, en pleine reconstruction, conforte son grand retour sur la scène internationale avec l’organisation des JO, un groupe de jeunes ouvrières de l'usine textile Nichibo, baptisé les Sorcières de l’Orient, connait un destin hors du commun. Après le travail, elles s’entraînent dans les conditions les plus rudes pour se hisser au sommet du volley-ball mondial. Nul besoin d’être fan de volley-ball, le film de Julien Faraut fascine autant par sa forme que par son contenu. Un mélange très réussi d’images d’archives retravaillées, stupéfiantes, des entraînements notamment, et d’images animés de manga sur fond d’electro hypnotisante. Car à travers l’histoire de cette équipe, c’est la reconstruction du japon d’après-guerre qui est évoquée. Aujourd’hui septuagénaires, cinq de ces joueuses reviennent avec espièglerie sur cette violence morale et physique imposée par un entraîneur, vu comme une figure paternaliste, qui les a propulsées au sommet. Leur histoire nourrira la pop culture durant des générations.

Accessible via la plateforme numérique Les Yeux Docs disponible sur le portail de la bibliothèque (onglet ressources numériques)

 

Dans une brasserie parisienne, Mia est prise dans un attentat.

Trois mois plus tard, alors qu'elle n'a toujours pas réussi à reprendre le cours de sa vie et qu'elle ne se rappelle l'événement que par bribes, Mia décide d'enquêter dans sa mémoire pour retrouver le chemin d'un bonheur possible. La réalisatrice s’inspire du tragique attentat parisien survenu le 13 novembre 2015. Elle pointe sa caméra du côté d’une victime et ne s’arrête pas sur les horreurs et les méfaits commis par les terroristes. Un film profond et éprouvant qui montre avec éclat à quel point il est difficile de se reconstruire après un tel traumatisme, lorsque même les proches ne peuvent comprendre les séquelles d'une telle déflagration physique mais surtout psychologique ; mais également à quel point la solidarité peut apporter de l'apaisement, et la volonté de se régénérer.

Revoir Paris, de Alice Winocour, 2023

Iran 2001, une journaliste de Téhéran plonge dans les faubourgs les plus mal famés de la ville sainte de Mashhad pour enquêter sur une série de féminicides.

Elle va s'apercevoir rapidement que les autorités locales ne sont pas pressées de voir l'affaire résolue. Ces crimes seraient l'œuvre d'un seul homme, qui prétend purifier la ville de ses péchés, en s'attaquant la nuit aux prostituées.

Un polar poisseux et volontairement violent qui analyse les réactions d’une opinion qui s’est quasiment rangée du côté du tueur de prostituées. Le réalisateur redonne toute leur humanité à ces femmes en perdition en montrant ces corps abîmés, meurtris. Le film n’a bien sûr pas été tourné en Iran où la censure est très forte. Zar Amir Ebrahimi, qui joue le rôle de la journaliste combative et déterminée, est époustouflante. Elle illustre à merveille l’émancipation des femmes en Iran, concrétisée par le soulèvement féministe iranien.

Les nuits de Mashhad, de Ali Abbasi, 2022